la dialectique problème/technique

 

 

 

La dialectique Création-Résolution de problèmes technico-tactiques dans l’apprentissage du volleyball.

 

 

 

L’utilisation de certaines parties de son corps pour recevoir et transmettre le ballon en volley est à la fois une réponse technique mais aussi tactique. Il n’y pas de gestes techniques désincarnés d’une intention tactique. C’est en cela que je traiterai non uniquement de problèmes ou objets techniques mais bien d’objets technico-tactiques.

 

 

 

Les objets technico-tactiques (TT) dont on vise l’acquisition chez les élèves sont des objets vivants. Leur naissance est datée. Leur croissance et leur développement se sont réalisés par étapes diverses, non homogènes. Certains objets sont décédés rapidement et d’autres perdurent tout en poursuivant une évolution douce.

 

Leur vie est consubstantielle à l’existence et à la persistance d’un problème technique. Sans problème TT il n’y a aucune nécessité à s’engager dans un processus d’élaboration d’outils TT. De même et dialectiquement il n’y pas d’intérêt à déployer un outil TT en dehors du contexte problématique qui lui donne son sens.

 

 

 

Nous envisagerons ce rapport problème/solution TT en tentant de le problématiser autour du processus d’évolution historique du volley comme pratique culturelle mais aussi au processus d’acquisition de nouveaux pouvoirs pour les apprenant-es.

 

 

 

1- Création-Résolution de problèmes technico-tactiques : le moteur de l’évolution historique de la pratique sociale.

 

 

 

Depuis sa création sportive au milieu du siècle, les évolutions réglementaires, techniques et tactiques ont sans cesse navigué, de manières complexes et interactives, pour rééquilibrer le rapport attaque-défense. L’égalité des chances entre l’attaque et la défense doit être préservée. Lorsque l’attaque prend l’ascendant sur la défense, les commissions réglementaires tentent de redonner des moyens à la défense et/ou de diminuer les moyens dont dispose l’attaque. L’attaque est alors, de manière relative, confrontée à de nouveaux problèmes. Ces périodes sont riches en inventions techniques, en réflexions stratégiques, en recherches de développement physique. Cette dynamique représente la vie des pratiques culturelles. Elle est révélatrice de la capacité des humains à construire des réponses de plus en plus poussées par rapport à des problèmes de plus en plus complexes.

 

Pour éclairer cette dynamique, décrivons, de manière synthétique, une phase historique d’aller-retour entre les modifications réglementaires et les adaptations humaines dans le rapport attaque-défense.

 

            Dans le milieu des années 60, l’activité a connu une crise d’intérêt dans la mesure ou les attaques avaient lieu systématiquement aux ailes et qu’elles étaient indéfendables. Trois règles fondamentales sont alors apparues:

 

            - L’autorisation du franchissement des mains au contre (1964).

 

            - La mise en place d’une ligne d’attaque pour les arrières (1968).

 

            - La mise en place d’antennes flexibles sur le filet (1970).

 

Ces trois règles ont eu pour effet de limiter spatialement la zone de tir et d’éloigner les attaquants de la cible, donc, de rééquilibrer le Rapport A/D en faveur de la défense. Le rétrécissement de l’espace d’attaque ainsi que le franchissement des mains ont rendu moins efficaces les attaques aux ailes.

 

L’adaptation offensive se réalisa par le développement de rythmes d’attaques plus rapides à proximité du passeur pour retenir un contreur. L’incertitude ainsi créée devenait temporelle et spatiale. Les attaquants et les passeurs ont du développer des savoir-faire techniques, les entraîneurs ont du construire des combinaisons d’attaque en surcharge pour s’adapter aux problèmes posés par les nouveaux moyens accordés aux défenseurs. Les attaquants se sont adaptés, ont progressé, ont stabilisé des nouveaux moyens qui les rendent de nouveaux supérieurs à la défense en attendant une nouvelle évolution réglementaire.

 

 

 

En synthétisant, on perçoit qu’une apparition de solution technico-tactique (franchir les mains au contre) devient dialectiquement un problème TT posé aux attaquants qui y répondent en inventant une nouvelle réponse (attaques rapides à proximité du passeur) qui, à son tour, devient un problème à résoudre pour les contreurs adverses… 

 

 

 

L’évolution même d’un objet TT constitue donc, en lui même, un nouveau problème à résoudre.

 

 

 

Cette logique historique de résolution/création technico-tactique peut elle servir de cadre de propositions de contenus en volleyball scolaire ?

 

 

 

2- Jouer au volley en débutant : quelles solutions technico-tactiques pour résoudre les problèmes naissant progressivement de l’opposition?

 

 

 

 

 

Le contexte pour que le jeu soit possible est fondamental. La dimension des terrains, la hauteur du filet, le nombre de jouer-eues, le rapport au ballon, le rapport au(x) partenaire(s) sont des variables qui structurent les problèmes technico-tactiques auxquels l’enseignant-e confronte les élèves. Leur dosage engendre des situations qui peuvent aller de l’ennui à la griserie.

 

 

 

Dans le détail nous traverserons les trois premières étapes pour terminer, sans les détailler, les autres étapes.

 

 

 

ETAPE 1 : Renvoyer directement en touche haute.

 

 

 

Situation 1 : 2 contre 2 ; filet 2,25m, 1 touche de balle au dessus des épaules, terrain de 3m de profondeur pour 4,5m de large, mise en jeu balle lancée à deux mains par en dessous, départ des réceptionneurs en dehors du terrain en arrière.

 

 

 

 

 

Aménagement didactique

Quels problèmes technico-tactiques ?

Quelles solutions technico-tactiques ?

Partir en dehors du terrain

Protéger son terrain

Etat de vigilance posturale et informationnelle

Touche unique

Le ballon reçu au dessus de la cible est un danger

Renvoyer directement le danger

Au dessus des épaules

Atteindre précisément l’espace adverse

Les mains tonifiées autour du ballon

2 contre 2

Décider qui intervient

Aider à la lecture balle out/in

Parler et pré-planifier l’intervenant dans l’intervalle.

 

 

 

Transition : à la fin de cette étape (2-3 séances) les élèves ont résolu le problème d’une défense de leur terrain en renvoyant directement le ballon vers le terrain adverse. Il y a fréquemment des échanges « ping-pong ». Cette situation pose un nouveau problème : Comment marquer en atteignant la cible et, non plus seulement, en provoquant une faute adverse ? Il faut alors construire un outil technico-tactique adapté dans un nouveau contexte d’un terrain plus long… et donc EPUISER le renvoi direct.

 

 

 

ETAPE 2 : Tirer directement en touche haute.

 

 

 

Situation 1 : 2 contre 2 ; filet 2,25m, 1 touche de balle au dessus des épaules, terrain de 6m de profondeur pour 4,5m de large, mise en jeu balle lancée à deux mains par en dessous depuis la ligne des 3 m, départ des réceptionneurs en dehors du terrain en arrière.

 

 

 

 

 

Aménagement didactique

Quels problèmes technico-tactiques ?

Quelles solutions technico-tactiques ?

Partir en dehors du terrain

Protéger son terrain

Etat de vigilance posturale et informationnelle

Touche unique

Le ballon reçu au dessus de la cible est un danger

Renvoyer directement le danger

Au dessus des épaules

Atteindre précisément l’espace adverse

Les mains tonifiées autour du ballon

2 contre 2

Décider qui intervient

Aider à la lecture balle out/in

Parler et pré-planifier l’intervenant dans l’intervalle.

6 m de long

Atteindre le fond du terrain adverse

Dissocier les poussées bras jambes. Tonification doigts, mains, bras.

 

 

 

Transition : à la fin de cette étape (2-3 séances) les élèves ont résolu le problème de l’attaque des adversaires en tirant directement le ballon vers le fond du terrain adverse. Il y a moins d’échanges « ping-pong ». Cette situation pose un nouveau problème : Comment renvoyer un ballon reçu en zone arrière? Il faut alors construire un outil technico-tactique adapté dans un nouveau contexte accordant une seconde touche au sein de l’équipe… et donc UTILISER le partenaire.

 

 

 

Ces deux étapes préalables au jeu en deux touches est primordiale pour montrer l’utilité et la limite du renvoi direct. Ces deux étapes sont alors fondamentales pour construire l’alphabétisation des élèves aux trajectoires de ballon variés.

 

 

 

 

 

 

 

ETAPE 3 : Renvoyer à deux en touche haute.

 

 

 

Situation 1 : 2 contre 2 ; filet 2,25m, 2 touches max de balle au dessus des épaules, terrain de 6m de profondeur pour 4,5m de large, mise en jeu balle lancée à deux mains par en dessous depuis la ligne des 3 m, départ des réceptionneurs en dehors du terrain en arrière.

 

 

 

 

 

Aménagement didactique

Quels problèmes technico-tactiques ?

Quelles solutions technico-tactiques ?

2 touches max

Dans quelle situation utiliser le relai?

Comment relayer pour que le partenaire renvoi ?

Se différencier intervenant-non intervenant.

Relayer haut vers l’avant.

S’orienter pour relayer par l’oblique

Au dessus des épaules[1]

Atteindre précisément l’espace désiré.

Les mains tonifiées autour du ballon.

 

 

 

Transition : à la fin de cette étape (2-3 séances) les élèves ont résolu le problème du renvoi du ballon à deux quand il arrive en zone arrière. Il y a quelques d’échanges. Cette situation pose un nouveau problème : Comment tirer un ballon avec une trajectoire tendue ou descendante vers la cible adverse? Il faut alors construire un outil technico-tactique adapté dans un nouveau contexte en baissant la hauteur du filet… et construire l’attaque smashée…

 

 

 

Et ainsi de suite.

 

Les étapes se poursuivent en agrégeant à cette logique de création/résolution de problèmes technico-tactiques un ensemble d’outils techniques.

 

Ces outils apparaissent sous forme de réponses, à un moment donné, à un problème rencontré. Ils ont un sens. On cherche juste à les repositionner dans leur utilité, leur raison d’être.

 

Ainsi et sans détailler:

 

Pour répondre au problème posé par des trajectoires descendantes on fait apparaître le besoin de la manchette de défense.

 

Pour répondre au problème posé par les défenses nouvellement réalisées mais qui ne permettent pas une contre attaque sur la seconde touche, on fait apparaître le besoin de la touche de transition en autorisant la 3ème touche de ballon.

 

Pour s’opposer au problème posé par les nouvelles attaques se rapprochant du filet grâce aux trois touches on fait apparaître le besoin du contre individuel.

 

Pour s’opposer au problème posé par le contre individuel on fait apparaître le besoin de temps et de zone d’attaque différenciés.

 

Pour s’opposer au problème posé par les choix multiples du passeur on fait apparaître le besoin d’un service déstructurant la réception et éloignant la seconde touche de la zone favorable de passe.

 

 

 

Les acquisitions technico-tactiques chez les élèves suivent alors la même logique que leurs apparitions historiques. Elles sont contextualisées. Elles répondent à des problèmes et, dialectiquement, sont créatrices d’autres problèmes.

 

 

 

 

 



[1] Cette règle n’interdit pas les frappes à une main de type smash. L’interdiction de jouer sous les épaules active la vigilance des élèves et permet la construction du renversement de la tête sous le ballon. Cet apprentissage oblige à sortir de la motricité usuelle (regard horizontal) qui est indispensable pour développer un jeu intentionnel et bonificateur avec les partenaires.

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